Accompagner le deuil « étape par étape »
L’accueil des familles en deuil
L’accueil des familles en deuil nécessite de l’attention, de la délicatesse, une attitude d’écoute à leur service et surtout du temps à leur accorder.
Cet ensemble d’attitudes repose également sur une connaissance suffisante de ce qu’est le deuil, son déroulement, ses étapes dans le travail qu’il demande, ses difficultés et ses complications afin de pouvoir mieux prendre en mains son accompagnement.
Le deuil n’est pas une maladie mais une épreuve de la vie que chacune traverse un jour ou l’autre au cours de son existence et qui demande le soutien des proches et des professionnels qui sont à son contact. Son déroulement et son évolution découlent essentiellement de la nature de la relation qui existait auparavant entre ces deux personnes, celle qui est morte et celle qui est endeuillée.
C’est à dire que chacun ne réagit pas de la même façon dans une même famille. Chaque personne est particulière, chaque malade est particulier, chaque mort est unique, chaque deuil également. Mais tous les deuils parcourent le même cheminement.
Le déroulement du deuil
Son parcours s’étend sur trois périodes : le choc du début, l’état dépressif central et le temps du rétablissement.
Le choc inaugural existe toujours, même s’il est plus évident dans les morts brutales et inattendues. Il intéresse toute la personne dans son affectivité – la douleur, la colère, la révolte – dans son corps qui est affecté de multiples façons et dans son comportement.
Bientôt s’installe un authentique état dépressif, du moins dans les deuils importants, ceux qui nous sont les plus chers. A la souffrance s’ajoute une grande difficulté à fonctionner tant sur le plan physique que psychologique et une perturbation plus ou moins accentuée de l’état général. Cet état dure des semaines, des mois ou des années, sans qu’il soit possible d’assigner un délai normal à la durée du deuil.
Le rétablissement s’annonce d’abord dans les rêves où s’expriment de nouveaux intérêts qui se concrétiseront dans la vie réelle par la suite. Mais cette évolution est discontinue et l’endeuillé éprouve encore à cette époque des périodes de grande fatigue et de grande tristesse.
Le travail de deuil
Ce cheminement que l’on voit de l’extérieur exprime le douloureux travail intérieur que nous demande toute perte importante, pour être progressivement intégrée avec le temps.
Il se réalise dans la douleur – être en deuil, c’est souffrir – dans la régression également – un véritable retour en arrière passager dans notre évolution intérieure – et comprend trois grands mouvements :
– l’acceptation : à la fois de la réalité extérieure, objective de la perte, mais également de sa réalité intérieure, c’est à dire de l’état dans lequel nous met le deuil. Nous nous sentons dans une impuissance presque complète, dans un grand déséquilibre, une grande faiblesse, une grande souffrance. Nous nous demandons si nous ne sommes pas anormaux et si la vie vaut encore la peine d’être vécue.
– l’intériorisation : la mort fait disparaître la personne que nous aimons ; aussi sa présence intérieure prend toute la place en nous. Nous ne pensons qu’à lui, qu’à elle qui occupe tout notre espace intérieur. C’est alors que se réalise le coeur du travail du deuil – la remémoration – tous les souvenirs reviennent pour nous dire qu’il n’est plus. Des identifications au disparu sont habituelles pendant ce temps.
– la culpabilité : elle peut être objective lorsque nous avons des choses réelles à nous reprocher. Mais elle est de toute façon inconsciente, liée alors aux mouvements hostiles que nous avons eus à l’égard de la personne aimée à certains moments
Les issues du deuil
Le plus souvent, le deuil se déroule normalement avec l’aide de l’entourage et avec le temps, il arrive de lui-même à son terme. Comme toutes les épreuves de la vie, il est habituellement un facteur de maturation ramenant notre attention et notre intérêt sur les valeurs essentielles de l’existence, et sur le sens que nous donnons à notre vie.
Mais il est plus difficile à certaines périodes de la vie, en particulier durant l’enfance, l’adolescence, la grossesse et le grand âge. Il peut aussi dans certains cas devenir compliqué ou même franchement pathologique, lorsqu’il donne lieu à une authentique maladie physique ou mentale. Le deuil a une influence considérable sur la santé physique, mais ceci n’est pas bien connu même des professionnels de santé.
Les facteurs de risque sont essentiellement liés à la relation antérieure à la perte, lorsqu’elle était nettement marquée de dépendance et d’ambivalence, à tous les états de fragilité de la personne endeuillée, qu’ils soient momentanés ou durables, qu’ils s’expriment sur le plan de la santé physique, sur le plan psychologique ou social. La solitude et l’isolement sont aussi de grands facteurs de risque.
Les circonstances de la mort ont aussi leur importance lorsqu’elles sont brutales, tragiques et inhabituelles : ce sont les deuils traumatiques : accidents, meurtres, attentats, cataclysmes, guerres, génocides, etc. Le suicide est également un deuil traumatique. Ces différents facteurs de risque peuvent s’ajouter les uns aux autres. De toutes façons, la situation est encore plus douloureuse en cas de mort d’enfant et dans les deuils multiples ou rapprochés.
L’accueil et l’accompagnement des familles en deuil
L’accueil des familles commence bien avant la mort, dès que le malade entre dans le service et tout au long de son séjour qui le mènera à son terme. La famille a besoin d’attention, d’écoute, donc de temps et de disponibilité. Elle a des questions à poser et des informations à recevoir régulièrement tout au long de la maladie. Plus la mort approche et plus il convient de laisser de la place à la famille et de l’inciter à participer aux soins de nursing de ce malade en fin de vie.
Il est également très souhaitable de favoriser l’adieu à la personne qui vient de mourir en la laissant quelque temps dans sa chambre afin que tous les membres de la famille puissent venir se recueillir près d’elle, y compris les enfants, que l’on a le plus souvent tort d’écarter de la mort alors qu’il conviendrait de les faire participer en les accompagnant.
Les soignants ont également besoin de pouvoir exprimer leur vécu, leurs émotions et leur chagrin au mieux dans des groupes de partage mis en place à cet effet.
Dans certaines circonstances, il peut être très utile d’orienter les familles vers des associations d’aide aux personnes en deuil, en particulier lorsqu’il existe des enfants en deuil, des personnes fragiles et / ou des circonstances particulièrement difficiles.
> La liste des associations Vivre son deuil près de chez vous